Le messager / The go-between
pour orchestre et narrateur (1996/99)
Œuvre en cinq parties enchaînées (un seul mouvement) :
I Introduction
II Danse des bois
III Les cuivres de la frontière
IV Pluie de cordes
V Conclusion
Note de programme
Malgré qu’on lui ait commandé à l’origine une œuvre pour jeune public, Michel Gonneville a vite senti que ce qu’il élaborait pourrait s’adresser à un public plus large. C’est dans cette optique que l’œuvre est intégrée au programme des Grands concerts de ce soir.
Le court texte que le compositeur a écrit à partir d’une idée originale de sa fille tient à la fois de la fantaisie (telle Le songe d’une nuit d’été de Shakespeare) et du conte musical. Le foulard d’un jeune garçon est emporté par le vent et s’envole pour un voyage qui le mènera ultimement outre-frontière entre les mains d’une jeune fille. Le foulard sert de trait d’union entre ces deux enfants habitant des pays qui ne se parlent plus et se battent. Cette simple anecdote, toujours universellement illustrée, est développée surtout dans l’introduction et la conclusion de l’œuvre et sert de prétexte au cœur musical de l’œuvre et aux images fantastiques qu’il veut évoquer.
Qu’a donc vu ce messager en survolant les terres respectives ? D’un côté de la frontière, il y a «une danse étrange d’enfants griffus dans les bois» ; de l’autre, l’alchimie de deux «minuscules vieillards à violons qui préparent un arc-en-ciel» sous une pluie de cordes. Entre les deux, au point de contact, le violent «choc de deux armées de cuivres et de bâtons». En plus de renvoyer aux différentes familles de l’orchestre, ces images permettaient au compositeur d’opposer métrique dansante, homorythmies violentes et nuages de pizzicati, consonances riches et complexes et dissonances dures, courbes mélodiques tantôt ascendantes, tantôt descendantes. Il n’y a pas jusqu’au changement de couleur du foulard qui n’ait son équivalent musical, montant et planant dans l’aigu des cordes d’un côté de la frontière, et, de l’autre, retombant chez les bois à partir des trilles des flûtes et piccolo. Des soli choisis «incarnent» les personnages humains de l’histoire : le saxophone soprano suit les états d’âme du garçon, l’alto solo ceux de la jeune fille.
Cette œuvre est une commande de l’Orchestre symphonique de Montréal. Le compositeur a bénéficié pour l’écrire d’une bourse du Conseil des arts et des lettres du Québec. Elle est dédiée à Charles Dutoit, dont le travail accompli avec les musiciens de l’orchestre force l’admiration.